Film et débat : Pesticide mon amour


 

Comme disait la chanson : « C’est l’histoire d’un amour » entre une agriculture qui doit répondre rapidement aux besoins et des produits chimiques entre les mains d’apprentis sorcier. Le film souligne les mises en garde constantes qui ont été portées par les médecins et certains scientifiques, dès les années 1960 ; et l’hypocrisie d’une administration qui gouverne l’agriculture par décret, en s’abritant derrière des avis d’agences ou comités, tirés de leur contexte. Car un avis sur la mise sur le marché ne signifie pas qu’un produit destiné à traiter ponctuellement une maladie puisse être utilisé de façon préventive et à grande échelle.

 

Le débat a été organisé le 9 avril 2016 par l’AMAP Sud Bassin et Générations Futures dans le cadre de la semaine des Alternatives aux pesticides  comme chaque année désormais. Il a permis aux 70 participants d’intervenir et de poser des questions à Dominique Bimboire, apiculteur membre de la confédération Paysanne, Jean Marie Froidefond, océanographe et Cyril Giraud de l’association Générations Futures, qui avait appelé la première à combattre l’usage des pesticides, dès 1996.

Tous les intervenants ont insisté sur l’omniprésence des pesticides, dans le milieu naturel comme dans notre alimentation et nos maisons, avec des conséquences néfastes, scientifiquement démontrées, et de plus en plus visibles pour la santé humaine. Les agriculteurs, les populations proches des lieux de pulvérisation, les enfants et les femmes enceintes sont les plus menacés. En dépit des résolutions prises par le Grenelle de l’environnement, ils ont rappelé que la France restait en 2014 le premier consommateur de pesticides de l’Union Européenne. Même si les insecticides les plus puissants et les plus dangereux pour les abeilles, les pollinisateurs et la santé humaine, les néo-nicotinoïdes seront finalement interdits… en 2018, nombreux sont ceux qui sont toujours utilisés en agriculture ( de 10 à plus de 30 traitements annuels, des melons aux pommes et à la vigne) et dans nos maisons. Tous ont insisté sur l’importance de l’information des consommateurs et le bannissement de ces produits de notre vie quotidienne.

 

Jean Marie Froidefond a souligné les effets majeurs sur la qualité des eaux du bassin et les ressources en eau de l’augmentation des traitements des grandes cultures en amont de la Leyre, avec des traces de traitements plus anciens des pesticides aujourd’hui interdits. Il a rappelé que les rares analyses sur les légumes consommés ont montré que des courgettes et les premiers fruits comportaient des traces des produits de traitements jusque dans leur pulpe. Plusieurs personnes se sont inquiétées des infiltrations provenant des cultures industrielles de carottes, des centres de traitement des déchets, de l’imprégnation des sols par les traitements antérieurs, même lorsqu’une agriculture biologique est installée après quelques années sans traitements ; malheureusement les signaux d'alarme qui devraient être portés par les scientifiques sont contrecarrés par l'omniprésence du lobbying des fabricants de produits et leur participation au financement de nombreux contrats de recherche... Ils choisissent d’investir sur les produits et les contextes qui posent le moins de problèmes et le résultat est toujours conforme à leurs attentes !

Il a été appelé à mener des études indépendantes, sur la qualité nutritive et sur la présence de produits dangereux dans l’alimentation. Et à reconquérir des terres pour l’agriculture biologique, car à la longue la dépollution peut se faire, même s’il faut parfois 10 ans, voire plus pour réduire l’imprégnation de certains produits dangereux.

 

Cyril Giraud a insisté sur les conséquences de l’augmentation des traitements sur la santé, notamment les cancers, la reproduction de l’espèce humaine et les retards de développement. Mais il a souligné que les populations les plus exposées sont les agriculteurs, dont les maladies professionnelles qui en résultent à l’évidence, ne sont pas reconnues par la MSA, obligeant à recourir à la justice pour obtenir une (maigre) compensation. L’enjeu est aussi important pour les femmes enceintes et les enfants, dont l’exposition aura des conséquences décalées dans le temps, mais très importantes, car les produits sont aujourd’hui de plus en plus dangereux, même dans les cas où les tonnages utilisés diminuent. Il a également appelé à la plus grande prudence sur les produits ménagers, qu’il s’agisse des insecticides, des désinfectants, des traitements de végétaux non alimentaires, qui sont également dangereux pour celui qui les voisine.

 

Dominique Bimboire a rappelé les principaux lanceurs d’alertes qui ont successivement averti des dangers des perturbateurs endocriniens, des néo-nicotinoides et de la porte ouverte aux traitements excessifs, ouverte par les OGM. Renverser la vapeur est indispensable mais parfois dramatique, dans un contexte agricole fragilisé, où les petites exploitations disparaissent constamment, où des agriculteurs se suicident faute de pouvoir faire face à la fuite en avant des coûts induits par les traitements. L’humus et le milieu vivant se sont très fortement réduits en quelques années (50 % de la couche d’humus). Les solutions sont à longue haleine et passent par une reconstitution de la biodiversité en commençant par une agriculture associant plusieurs production et élevages complémentaires, reconstituant les espaces naturels intermédiaires comme les haies, mais aussi des forêts. Celles-ci sont nécessaires à la survie des insectes et de la vie du sol, à la communication entre les espèces et les végétaux. Ce retour aux méthodes de culture inventée par des milliers d’années d’expérience humaine pourrait éviter les dérives récentes du système économique attaché à l'utilisation des variétés hybrides, des OGM, mais aussi la disparition des variétés paysannes et de la biodiversité au profit des monocultures industrielles...

Que faire ? Le tableau ci-joint donne une idée des pistes possible pour chacun et la situation peut évoluer sur le bassin d’Arcachon, comme en témoignent les maraîchers et éleveurs en productions biologiques qui s’installent ; mais aussi l’action des citoyens telle que le collectif Aliment-Terre qui s’est mis en place fin 2015 avec l’objectif d’améliorer notre alimentation à travers la systématisation des circuits courts et du bio dans les cantines, l’installation d’une ceinture maraîchère autour du bassin, une ferme pédagogique et un projet alimentaire local. Plusieurs personnes ont également appelé à une vigilance sur les sources de pollution et l’évolution vers des cultures industrielles autour du bassin. Et bien sûr adhérer à une AMAP !

 

SOURCES DE PESTICIDES SOLUTIONS POUR ALLER PLUS LOIN
 Alimentation Passer au bio systématique (95 % sans pesticides), éliminer les produits hors saison, privilégier les produits locaux ou français.
En agriculture, supprimer ou réduire au minimum les engrais chimiques et les pesticides, utiliser des systèmes de culture privilégiant la biodiversité et la lutte biologique contre les insectes ravageurs des cultures (agriculture biologique, agro-écologie).
 Adhérer à une AMAP, passage au bio des cantines, à la vente directe
Recours aux produits de marques Demeter, Bio cohérence, Nature et progrès
Réclamer l’interdiction des insecticides systémiques
Jardin    Désherber à la main, associer des plantes qui repoussent les parasites  Paillages, plantes couvre sol, attirer les oiseaux, poules

Antiparasites dans la maison 
Exemples : traitements des plantes d’intérieur, antimoustiques ou mites…

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Surveiller l’humidité et la chaleur de la pièce, laver souvent la literie et passer régulièrement l’aspirateur pour réduire la prolifération des acariens. Sortir et brosser régulièrement les vêtements, utiliser des huiles essentielles contre l’installation des mites Plantes anti parasites

Produits de nettoyage
Exemples : antibactériens, produits alertant sur le danger pour les enfants

Revenir à des produits de base : le vinaigre blanc, le bicarbonate et les cristaux de soude, le savon noir et le savon de Marseille Les produits de « 100 % Gironde » (notamment à l’AMAP)

Traitements des produits industriels (tissus, plastiques, colles et bois)     Chercher des produits bio, se renseigner sur les composants    Rechercher des alternatives

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Environnement (air, eau, sol)

Eviter la proximité des champs lors des épandages, fermer les fenêtres… Suivre de près les épandages, demander des précisions aux collectivités locales